Vendredi 27 avril 2007. 15h30.
Le Président de l’Université Jean-Monnet a reçu, ce vendredi 27 avril, une délégation d’enseignants-chercheurs composée d’Anne Béchard-Léauté (LEA), Jean-Luc Breuil (lettres classiques), Philippe Rodriguez, Sylvain Excoffon et Annick Peters-Custot (histoire). Il convient de souligner d’emblée la disponibilité du Président et sa volonté de rencontrer cette délégation le plus tôt possible. Il a été difficile pour cette dernière, dans la précipitation, de pouvoir présenter une liste exhaustive des signataires de la motion formulée à l’AG du 27 mars, et qui a recueilli à ce jour environ 350 signatures d’étudiants, et une vingtaine de signatures d’enseignants.
On ne fera pas ici la retranscription intégrale des échanges qui se sont déroulés pendant la réunion, qui a duré une heure, mais on en soulignera les éléments essentiels.
La délégation, par la bouche de Sylvain Excoffon, expose les faits et exprime les très vives réticences des enseignants de l’UJM dans les facultés SHS et ALL face aux évaluations ministérielles des plaquettes proposées en L et Master, tant dans la forme que dans le fond : présentation souvent bâclée des avis ministériels, jeu de cache-cache officieux / officiel, volonté manifeste de diviser les enseignants entre départements, etc. Face à ces manières douteuses, la délégation exprime le caractère massif et solidaire de la réaction des enseignants.
Le Président manifeste son accord avec cette critique de la présentation des évaluations envoyées par le Ministère : la forme en est discutable et reflète, selon lui, une « doctrine » qui préside à ces évaluations et dont le caractère uniforme et partiel est la traduction [1]. On peut supposer que les « experts » sont munis d’une grille de lecture uniforme qu’ils plaquent sur l’évaluation de chaque composante, dont un des principes fondamentaux tient dans la possibilité pour les étudiants de changer de filière à tout moment de leur cursus universitaire, afin de sélectionner leur domaine, en fin de compte, par élimination (le Président parle à ce sujet de « formation à la carte »). Cette vision uniforme qui guiderait les évaluations s’oppose pourtant dans la pratique aux demandes des étudiants, dont bien peu pratiquent cette navigation entre matières, dont la possibilité existe déjà partiellement. Il faut aussi souligner la contradiction qui existe entre deux exigences du Ministère, celle de la « navigation » des étudiants entre filières, et celle de la professionnalisation.
Toutefois, le Président reste serein (les « navettes » seraient la règle), et estime qu’il faut se montrer conciliant en surface, sans renoncer dans le fond à maintenir les formations telles qu’elles ont été proposées par l’UJM. Son travail, estime-t-il, est de défendre les formations, mais dans la négociation, car il doit « rendre des comptes » et ne pas opposer une rigidité malvenue, qui risquerait de raidir à son tour le Ministère, et de provoquer ce qu’on aura voulu éviter.
Dans ce cadre, le Président compte sur un apaisement tant des enseignants-chercheurs que des étudiants, qu’une présentation trop alarmiste de la situation pourrait faire fuir : on pourrait dès lors craindre qu’une baisse d’effectifs sensible à la rentrée n’affaiblisse le potentiel de revendications de l’Université face au Ministère. La délégation souligne que les enseignants n’ont jamais voulu jeter de l’huile sur le feu, mais que la légitime inquiétude des étudiants était manifeste sans qu’on ait à en exciter l’ardeur ; et que, d’autre part, ce serait plutôt à la diminution des offres de formation qu’on pourra à l’avenir imputer une éventuelle « fuite » les étudiants.
Pour ce qui est des licences, le Président s’engage à faire tout son possible pour que les formations se retrouvent dans leur intégralité à la rentrée de septembre. Les membres de la délégation soulignent l’unité de tous face aux oukazes ministériels et la volonté de défendre avec fermeté l’ensemble des maquettes proposées par l’UJM, ce qui leur paraît être le meilleur moyen pour soutenir le Président dans ses démarches à venir.
En revanche, le Président ne pense pas que pèse une réelle menace sur les masters « recherche » (il a même dit que nos soupçons n’étaient pas « justes »). D’après lui, la volonté du Ministère est de fusionner les filières professionnalisantes et « recherche » pour maintenir des données quantitatives (= un nombre global d’étudiants) acceptables dans les masters. Le Président a remarqué qu’il n’y avait pour l’instant aucune obligation de les fusionner à l’UJM. Les membres de la délégation restent dubitatifs.
La discussion est également revenue sur la question des Écoles Doctorales. Le Président admet qu’il aurait préféré disposer d’Écoles Doctorales propres à Saint-Etienne, mais que la situation antérieure, d’une École Doctorale de site, « omni-disciplinaire » (terme fort péjoratif dans la vision ministérielle de la chose), associant SHS, ALL, Sciences « dures » et Ingénieurs (École des Mines) n’était pas non plus satisfaisante. L’établissement d’Écoles Doctorales co-accréditées (et non co-habilitées, le Président tient à insister sur la différence) avec Lyon II, Lyon III et l’ENS-LSH représente à ses yeux la possibilité maintenue d’avoir des étudiants inscrits en thèse et dirigés à Saint-Etienne, et de disposer pour eux d’allocations de recherche. De toutes façons, la masse critique en doctorants SHS et ALL, telle que le Ministère la conçoit, n’était pas atteinte à Saint-Etienne. Les membres de la délégation objectent que le critère de la « masse critique » n’est pas forcément opportun (il vaudrait du reste parler en termes de pourcentages de doctorant par rapport aux enseignants habilités à diriger des recherches), voire sans danger, et que l’existence d’une École Doctorale propre à Saint-Etienne est aussi une question d’image de l’Université, de prestige, et une question d’attractivité pour le bassin de recrutement des étudiants à l’UJM. Ce qui amène (enfin !) la délégation à mentionner le critère financier (= les économies d’échelle) qui semble peser lourdement dans la « doctrine » ministérielle qui préside aux évaluations des formations de l’UJM. On peut du reste réinsérer cette logique financière parmi les éléments fondamentaux des évaluations ministérielles pour la Licence. Toutefois, le Président ne paraît pas croire à cette motivation.
En fin de compte, le Président réaffirme sa conviction, selon laquelle on ne doit pas trop s’inquiéter, parce qu’à son sens, la plupart des formations de l’UJM, telles qu’elles ont été édifiées par les enseignants-chercheurs et travaillées pendant de longs mois, ont de bonnes chances d’être maintenues, pourvu qu’on garde le calme jusqu’au retour des évaluations définitives (dont personne ne sait la date). De leur côté, les membres de la délégation estiment qu’il est nécessaire de maintenir une certaine pression, et de montrer clairement que les enseignants-chercheurs restent vigilants, sans exclure des démonstrations plus poussées si les résultats des évaluations sont décevants voire menaçants pour l’avenir de l’ensemble ou d’une partie des filières de l’UJM.
La réunion prend fin vers 16h30.
[1] Pour exemple, Anne Béchard-Léauté souligne que, pour ce qui est du LEA (en « navette lourde »), le Ministère a reproché une insuffisante professionnalisation, ce qui est à l’évidence une accusation injuste